Entretien avec Maël
Je vis à Buenos Aires, en Argentine. Je travaille au sein d’une multinationale de la grande distribution au sein du service immobilier. Mon rôle est de commercialiser les locaux des galeries marchandes et des centres commerciaux qui appartiennent à l’entreprise. J’analyse également les actifs fonciers de l’entreprise pour éventuellement les densifier, les louer ou les revendre lorsqu’ils ont perdu de leur utilité, ce qui arrive de plus en plus dans le contexte actuel de déclin du modèle d’hypermarché.
- En tant que citoyen, professionnel, acteur, comment contribuez-vous, aujourd’hui, à la construction de la ville de demain ?
En tant que professionnel je contribue malheureusement assez peu à la vision qui est la mienne de la ville de demain. Les centres commerciaux sont en effet des espaces privés et ultra standardisés qui sont en contradiction avec la ville ouverte et passante à laquelle j’aspire. Plus humblement, en tant que citoyen, je participe à la construction de la ville de demain en consommant le plus responsable possible, en triant mes déchets ou en limitant les consommations d’énergie (ce qui à Buenos Aires est loin d’être généralisé)
- Quelle est votre vision de la ville de demain ?
La ville de demain, celle à laquelle j’aspire en tout cas, est une ville passante, pour reprendre les termes de l’architecte urbaniste David Mangin. La ville qui s’est développée ces dernières décennies est faite de blocs étanches qu’il faut contourner pour se rendre d’un point à un autre : centre commerciaux, cité administrative, quartiers fermés ultra sécurisés pour familles aisées (déjà très développés en Amérique du Sud ou aux Etats-Unis), lotissements en escargots… La ville passante va à l’encontre de ces système de l’entre soi et de l’enfermement et vise à recréer des perméabilités en valorisant l’espace public pour les modes doux (piétons et vélos) ainsi que les transports en commun. Une ville où tous les citoyens ont la possibilité, l’opportunité de se croiser, la ville du « frottement » et de la rencontre potentielle, un premier pas vers la ville du vivre ensemble.
Parmi les thématiques ci-dessous, qu’elles sont celles qui vous interpellent ? Pourquoi ? Quels sont vos questionnements, autour de ces thématiques ?
Les mobilités de demain ? / Vivant à Buenos Aires, une mégalopole particulièrement affectée par la congestion automobile et la pollution qui y est liée, cette thématique m’intéresse tout particulièrement. La mobilité de demain dans les mégalopoles des pays en voie de développement comme l’Argentine, passe avant tout par une planification (aujourd’hui presque inexistante) pour rationaliser les transports en commun, hiérarchiser les réseaux routiers et redonner une place aux modes doux. Buenos Aires est une ville sans relief, il est incompréhensible que les vélos ne représentent pas plus que 1% des déplacements.
Deux questionnements centraux : 1/ Comment mettre en place une gouvernance adaptée à de tels enjeux ; 2/ Comment financer de nouveaux projets d’infrastructures (remise en état du ferroviaire, développement des sites propres pour les bus, prolongement du réseau de métro…) dans un pays qui n’a pas eu accès aux financements internationaux pendant plus de quinze ans, suite à la crise systémique de 2001 ?