Entretien avec Manuel
- En quelques lignes, pour commencer, quelques mots pour te présenter ? Ton lieu de résidence, ton lieu de travail… ?
Sur le papier, je suis architecte, mais aussi urbaniste. Dans les faits, je travaille principalement sur des processus participatifs pour faire la ville avec les habitants.
Je travaille dans un bureau partagé, joint à une boutique associative, en centre ville, et habite une petite maison de ville, maison mitoyenne années 30 rénovée, à 20 minutes à pied de mon lieu de travail.
- En tant que citoyen, professionnel, acteur, comment tu contribues, déjà aujourd’hui, à la construction de la ville de demain ?
Je travaille pour une partie de mon activité seul, mais pour une grande part avec des collègues et surtout au sein d’un collectif engagé sur les questions de la participation citoyenne dans la ville. Notre approche passe par le fait de « faire », concevoir et réaliser des aménagements pour une valorisation et une appropriation de l’espace public sur une demande habitante, répondant à des usages que ces derniers portent. Nous accompagnons les demandes, en essayant d’apporter notre œil de professionnels sans brimer les envies de chacun.
Un autre pan de notre engagement porte sur la question de l’économie circulaire : travailler en boucle, prenant comme « ressources » ce que d’autres considèrent comme « déchets » pour les valoriser et leur donner une seconde (troisième, quatrième, …, vie). Concrètement, nous essayons, en partenariat avec la recyclerie Un peu d’R, de créer une filière du réemploi de mobilier et de matériaux.
En tant que citoyen, j’y participe par des choses simples : avoir un lieu de travail et un lieu de résidence proches (déplacements doux), consommer localement pour valoriser le savoir-faire et les ressources d’un territoire,… J’ai toujours perçu le fait d’habiter en ville, comme un acte militant, une affirmation d’un « vivre ensemble » vertueux, où l’on mutualise un ensemble de points positifs ne pouvant exister que par le rassemblement des personnes.
- Quelle est ta vision de la ville de demain ?
On en parle beaucoup, de la ville « connectée », je préfère une vision d’une ville « engagée » et « ambitieuse ». La volonté d’explorer de nouvelles façons de faire ensemble, de porter des ambitions humanistes dans un lieu où se regroupent tous types de populations (c’est là l’essence de la ville : un regroupement de personnes qui partagent des services, des équipements, des espaces,…).
Par « engagée » j’entends une ville qui assume son essence et qui valorise les bienfaits de ce regroupement en allant vers une gouvernance partagée avec ses habitants qui sont la force même de ces villes. Une ville n’est pas un lieu de repli sur soi ou de décisions bottom-up, elle doit être à l’inverse une écoute des demandes citoyennes et un lieu ou peut se développer le « pouvoir d’agir ». Elle est l’échelle idéale pour un engagement : on perçoit quasi immédiatement les bénéfices d’un engagement de chacun.
« Ambitieuse » porte surtout sur cette capacité à se réinventer. La ville est un lieu d’expérimentations continues, un lieu de l’itératif (on essaie, on regarde ce qui marche et ce qui ne marche pas, et on réessaie, en boucle…).
- Parmi les thématiques ci-dessus, qu’elles sont celles qui t’interpellent ? Quels sont tes questionnements ?
Toutes, mais plus particulièrement :
– “Petits et grands projets dans la ville ?” / Les questions de multiplicités d’échelles d’intervention et d’imbrication entre tous ces projets.
– “Accessibilité, partage et appropriation des espaces publics ?” / Comment rendre les espaces publics aux citoyens ?
– “Travailler dans la ville (tous secteurs d’activités confondus) ?” / Quelles activités dans la ville de demain ? La ville est devenue petit à petit un lieu de services, comment lui redonner des dimensions de production ?
– “Habiter et vivre dans mon quartier et dans ma ville ?” / La proximité comme engagement, les cercles de fréquentation, d’accessibilité, et la multiplicité de l’offre de la ville.
Merci à Manuel, d’être le premier à avoir répondu à notre envie de commencer à préparer le forum participatif du 1er avril, en partageant sa vision de la ville de demain, et la manière dont il contribue à la construire…