Entretien avec Benjamin
- Peux-tu te présenter en quelques lignes ? Quel est ton lieu de résidence, ton lieu de travail… ?
Je vis à Brest depuis six ans. Je travaille à l’ADEUPa, l’agence d’urbanisme de Brest-Bretagne. C’est une structure qui a pour missions d’observer le territoire pour comprendre comment il fonctionne, de mener des études et de formuler des conseils aux élus pour préparer l’avenir, et d’alimenter les réflexions collectives par le partage de ses données et travaux.
- En tant que citoyen, professionnel, acteur, comment tu contribues, déjà aujourd’hui, à la construction de la ville de demain ?
J’ai la chance d’avoir pour métier, précisément, de devoir comprendre et expliquer comment fonctionne la ville d’aujourd’hui, quelles sont les mutations en cours, et de réfléchir à ce que pourrait être la ville de demain. Nous essayons d’aborder la ville dans toutes ses composantes, sociales, économiques, physiques… C’est passionnant et en même temps ça appelle à l’humilité car une ville ou un territoire est un système complexe.
A titre personnel, j’essaie de contribuer à la construction de la ville de demain en essayant de montrer qu’elle peut être plus sobre en consommation de ressources naturelles, porteuse de plus de solidarités entre les habitants et pour autant performante sur le plan économique. J’ai par exemple fait le choix d’habiter le long de la ligne de tram et de la piste cyclable qui l’accompagne pour avoir le moins recours possible à la voiture. Je veille à l’impact écologique et social de mes achats, à la fois pour l’alimentation, les vêtements, l’énergie, et même la banque… Dans la famille nous essayons de réduire nos déchets, de développer l’usage partagé des objets (vive les médiathèques !), de donner ce qui ne nous sert plus… Le mois prochain, nous allons aussi améliorer l’isolation de notre maison.
Enfin, j’essaie de soutenir tout ce qui me semble contribuer à construire un avenir désirable, en y consacrant du temps, en investissant une partie de mon épargne ou faisant des dons. Et en essayant de mettre en réseau les différentes initiatives convergentes, comme au sein du collectif pour une transition citoyenne par exemple.
- Quelle est ta vision de la ville de demain ?
Pour moi, la ville de demain est d’abord une ville qui aura conscience qu’elle ne vit pas « hors sol ». Une ville est d’abord un lieu de rencontre entre des habitant.e.s, des travailleur.e.s, des commerçant.e.s. Elle est insérée dans un territoire qui lui apporte l’eau et, le plus souvent, l’énergie dont elle a besoin pour vivre. Il peut aussi lui apporter une bonne partie de sa nourriture, ce qui se traduit par le fait qu’on ne mange pas les mêmes choses à Brest, à Lyon ou en Alsace. C’est d’abord ce lien au territoire qui fait l’histoire d’une ville.
Donc la ville de demain c’est pour moi une ville qui connait son histoire, qui comprend son fonctionnement, et qui sait qu’elle s’insère de plus en plus dans des échanges ouverts aux échelles européenne et mondiale. Une ville qui a conscience de ce qu’elle veut apporter au monde et qui réfléchit à son rôle dans notre société globalisée. A Brest par exemple, la ville est d’abord le siège de la force océanique stratégique : c’est un beau sujet de réflexion sur ce que nous souhaitons apporter au monde. A partir de la fonction militaire, la ville a développé une remarquable connaissance des océans : c’est là aussi un magnifique sujet de réflexion sur ce que cette connaissance peut apporter au monde.
- Parmi les dix thématiques qui seront abordées lors du forum participatif, qu’elles sont celles qui t’interpellent ? Quels sont tes questionnements ?
Pour moi, le premier thème important sur la ville de demain, c’est « en quoi est-ce l’échelon de proximité qui nous permet de faire société » ? En quoi peut-on y construire un avenir commun ? C’est donc d’abord une question sociologique et politique. Je suis tenté de lire tous les autres thèmes, et ils sont passionnants, par ce prisme : en quoi contribuent-ils à faire de la ville une ville d’intégration, d’éducation, d’émancipation ? En quoi contribuent-ils au développement de l’autonomie des habitants et travailleurs de la ville ? Il me semble essentiel d’aborder cette dimension culturelle pour ne pas s’en tenir à une approche trop fonctionnelle de la ville qui risquerait de la déshumaniser.